Eclats de vers : Matemat : Espace vectoriel des polynômes
Table des matières
\( \newenvironment{Eqts} { \begin{equation*} \begin{gathered} } { \end{gathered} \end{equation*} } \newenvironment{Matrix} {\left[ \begin{array}} {\end{array} \right]} \)
\label{chap:vectpoly}
1. Introduction
AFAIRE : ARRANGER LE CHAPITRE
Il est clair d'après la définition des polynômes que les espaces \(\mathcal{P}_n\) sont des espaces vectoriels pour l'ensemble des scalaires \(S=\setR\) et que :
\[\mathcal{P}_n = \ev{\mu_0,\mu_1,...,\mu_n}\]
Nous allons montrer que \((\mu_0,\mu_1,...,\mu_n)\) forme une base de \(\mathcal{P}_n\). Pour cela, il nous reste à prouver l'indépendance linéaire des \(\mu_i\) :
\[\sum_{i=0}^n a_i \mu_i = 0 \quad\Rightarrow\quad a_0 = a_1 = ... = a_n = 0\]
c'est-à-dire :
\[\sum_{i=0}^n a_i x^i = 0 \quad\forall x \in\setR \quad\Rightarrow\quad a_0 = a_1 = ... = a_n = 0\]
Nous allons le montrer par récurrence.
Comme \(\mu_0=1\) on a évidemment :
\[a_0 1 = 0 \quad\Rightarrow\quad a_0 = 0\]
et la thèse est vraie pour \(n=0\). Supposons à présent qu'elle soit vraie pour \(n-1\). Choisissons \(p\in\mathcal{P}_n\) :
\[p(x) = \sum_{i=0}^n a_i x^i\]
et supposons que \(p(x) = 0\) pour tout \(x\in\setR\). Comme \(p(0)=0\), on a :
\[a_0 = 0\]
donc :
\[p(x) = \sum_{i=1}^n a_i x^i = x q(x) = 0\]
où l'on à définit \(q\in\mathcal{P}_{n-1}\) par :
\[q(x) = \sum_{i=1}^n a_i x^{i-1}\]
Il est clair que, pour tout \(x\ne 0\), \(q(x) = 0\). Mais comme les polynômes sont des fonctions continues, on a :
\[q(0) = \lim_{ \substack{ x \rightarrow 0 \\ x \ne 0 } } q(x) = 0\]
Donc \(q\) s'annule également en \(0\). On en conclut que \(q(x)\) est nul pour tout \(x\in\setR\). Par l'hypothèse de récurrence, les coefficients de ce polynôme sont tous nuls :
\[a_1 = a_2 = ... = a_n = 0\]
Rassemblant les résultats, il vient :
\[a_0 = a_1 = ... = a_n = 0\]
et \((\mu_0,\mu_1,...,\mu_n)\) forme bien une base de \(\mathcal{P}_n\).
2. Polynômes orthogonaux
Nous allons à présent voir comment construire des suites de polynômes orthogonaux pour le produit scalaire :
\[\scalaire{p}{q} = \int_a^b p(x) q(x) d\mu(x)\]
ou, lorsque c'est possible :
\[\scalaire{p}{q} = \int_a^b p(x) q(x) w(x) dx\]
2.1. Récurrence
On pourrait bien entendu partir de la suite de la base canonique de monômes \((1,x,x^2,...,x^n)\) et l'orthogonaliser en utilisant le procédé de Gram-Schmidt, mais on peut arriver à un algorithme plus rapide en utilisant les propriétés des polynômes. Soit \((\phi_n)_n\) une suite de polynômes orthonormés, où \(\phi_i\) est de degré \(i\). On a donc :
\[\scalaire{\phi_m}{\phi_n} = \int_A \phi_m(x) \phi_n(x) d\mu(x) = \delta_{mn}\]
Supposons que \((\phi_0,...,\phi_n)\) forme une base de \(\mathcal{P}_n\). On peut vérifier que \((\phi_0,...,\phi_n,x\phi_n)\) forme une base de \(\mathcal{P}_{n+1}\). On peut donc représenter \(\phi_{n+1}\) comme :
\[\phi_{n+1}(x) = a_n x\phi_n(x) + b_n \phi_n(x) + c_n \phi_{n-1}(x) + \sum_{i=0}^{n-2} d_i \phi_i(x)\]
Soit \(i \in \{0, ..., n-2\}\). La condition d'orthogonalité de \(\phi_{n+1}\) avec \(\phi_i\) s'écrit :
\[\scalaire{\phi_i}{\phi_{n+1}} = a_n \scalaire{\phi_i}{x\phi_n} + b_n \scalaire{\phi_i}{\phi_n} + c_n \scalaire{\phi_i}{\phi_{n-1}} + \sum_{j=0}^{n-2} d_j \scalaire{\phi_i}{\phi_j} = 0\]
L'orthogonalité implique que :
\( \scalaire{\phi_i}{\phi_n} = \scalaire{\phi_i}{\phi_{n-1}} = 0 \)
\( \scalaire{\phi_i}{\phi_j} = \delta_{ij} \)
On a aussi :
\[\scalaire{\phi_i}{x\phi_n} = \int_A x \phi_i(x) \phi_n(x) d\mu(x) = \scalaire{x\phi_i}{\phi_n}\]
Mais comme \(\phi_i\) est de degré \(i\), \(x\phi_i\) est de degré \(i+1\) et on peut l'exprimer comme :
\[x \phi_i = \sum_{j=0}^{i+1} \alpha_i \phi_j\]
Le produit scalaire devient alors :
\[\scalaire{\phi_i}{x\phi_n} = \sum_{j=0}^{i+1} \alpha_i \scalaire{\phi_j}{\phi_n} = 0\]
puisque \(j \le i+1 < n\). On en conclut que :
\[\scalaire{\phi_i}{\phi_{n+1}} = \sum_{j=0}^{n-2} d_j \delta_{ij} = d_i = 0\]
Les conditions :
\( \scalaire{\phi_{n+1}}{\phi_n} = 0 \)
\( \scalaire{\phi_{n+1}}{\phi_{n-1}} = 0 \)
impliquent respectivement que :
\( b_n = -a_n\scalaire{\phi_n}{x\phi_n} \)
\( c_n = -a_n\scalaire{\phi_{n-1}}{x\phi_n} \)
La condition de normalisation :
\[\scalaire{\phi_{n+1}}{\phi_{n+1}} = a_n \scalaire{x\phi_n}{\phi_{n+1}} = 1\]
nous donne alors la valeur de \(a_n\) :
\( a_n^2 \scalaire{x\phi_n}{x\phi_n}} - a_n^2 \scalaire{x\phi_n}{\phi_n}^2 - a_n^2 \scalaire{x\phi_n}{\phi_{n-1}}^2 = 1 \)
\( a_n = \left[\scalaire{x\phi_n}{x\phi_n} - \scalaire{x\phi_n}{\phi_n}^2 - \scalaire{x\phi_n}{\phi_{n-1}}^2\right]^{-1/2} \)
On voit donc que le choix du produit scalaire détermine :
\( \phi_0 = \unsur{\sqrt{\scalaire{1}{1}}} \)
\( \phi_1 = a_1 (x - \scalaire{\phi_0}{x} \phi_0) \)
ainsi que toute la suite de polynômes.
2.2. Approximation
Soit une suite de polynômes orthonormaux \((\phi_0,...\phi_n)\) pour le produit scalaire :
\[\scalaire{u}{v} = \int_A u(x) v(x) d\mu(x)\]
Nous cherchons l'approximation de \(u\) :
\[w(x) = \sum_{i=0}^n w_i \phi_i(x)\]
qui minimise l'erreur au sens intégral :
\[\scalaire{u-w}{u-w} = \int_A [u(x)-w(x)]^2 d\mu(x)\]
sur \(\mathcal{P}_n\). Imposant que la dérivée par rapport aux \(w_i\) soit nulle, on obtient :
\[2 \int_A \phi_i(x) [u(x)-w(x)] d\mu(x) = 0\]
Mais comme :
\[w_i = \int_A \phi_i(x) w(x) d\mu(x)\]
on obtient :
\[w_i = \int_A \phi_i(x) u(x) d\mu(x) = \scalaire{\phi_i}{u}\]
Ce qui n'a rien d'étonnant au vu des résultats du chapitre \ref{chap:vector}. On peut vérifier facilement que la hessienne de l'erreur par rapport aux \(w_i\) est bien positive. L'approximation ainsi définie :
\( w(x) = \sum_{i=0}^n \phi_i(x) \int_A \phi_i(y) u(y) d\mu(y) \)
\( w(x) = \sum_{i=0}^n \int_A \phi_i(x) \phi_i(y) u(y) d\mu(y) \)
minimise donc bien l'erreur sur l'ensemble des polynômes de degré \(n\).
2.3. Intégration de Gauss
Soit une suite de polynômes orthonormaux \((\phi_0,...\phi_n)\) pour le produit scalaire :
\[\scalaire{u}{v} = \int_A u(x) v(x) d\mu(x)\]
Considérons la formule d'intégration :
\[I(f) = \sum_{i=0}^n w_i f(x_i)\]
supposée approximer l'intégrale :
\[\langle f \rangle = \scalaire{f}{1} = \int_A f(x) d\mu(x)\]
Fixons les points \(x_0 < x_1 < ... < x_n\) et imposons que la formule soit exacte pour \(\phi_0,...,\phi_n\). On a :
\[\langle \phi_k \rangle = \sum_{i=0}^n w_i \phi_k(x_i)\]
où \(k = 0,1,...,n\). Définissant les matrices et vecteurs :
\( \varphi = (\langle \phi_k \rangle)_k \)
\( W = (w_i)_i \)
\( \Phi = \left(\phi_i(x_j)\right)_{i,j} \)
ces conditions se ramènent à :
\[\Phi W = \varphi\]
Si la matrice \(\Phi(n+1,n+1)\) est inversible, on a alors :
\[W = \Phi^{-1} \varphi\]
La formule est alors valable pour tout polynôme de \(\mathcal{P}_n\). Notons que
\[\langle \phi_k \rangle = \unsur{\phi_0} \scalaire{\phi_k}{\phi_0}\]
s'annule pour tout \(k\ne 0\). Si les racines de \(\phi_{n+1}\) sont toutes distinctes, on peut choisir les \(x_i\) tels que :
\[\phi_{n+1}(x_i) = 0\]
On a alors :
\[\langle \phi_{n+1} \rangle = I(\phi_{n+1}) = 0\]
et la formule devient valable sur \(\mathcal{P}_{n+1}\). Mieux, considérons un polynôme \(p\) de degré \(n+m+1\) où \(m \ge 0\) et sa division euclidienne par \(\phi_{n+1}\). On a :
\[p(x) = q(x) \phi_{n+1}(x) + r(x)\]
Comme \(q\) est de degré \(m\), on a :
\[q = \sum_{i=0}^m q_i \phi_i\]
Si \(m \le n\), on a donc :
\[\langle q \phi_{n+1} \rangle = \sum_{i=0}^n q_i \scalaire{\phi_i}{\phi_{n+1}} = 0\]
et :
\[\langle p \rangle = \langle r \rangle = I(r)\]
puisque \(r\) est de degré \(n\) au plus. Comme \(\phi_{n+1}\) s'annule en les \(x_i\), on a aussi ;
\[I(p) = I(r)\]
Rassemblant tout ces résultats, on obtient :
\[\int_A f(x) d\mu(x) = \sum_{i=0}^n w_i f(x_i)\]
pour tout polynôme \(f\in\mathcal{P}_{2n+1}\). En pratique, on utilise ces formules d'intégration pour des fonctions qui ne sont pas forcément des polynômes.
3. Legendre
Les polynômes de Legendre sont orthogonaux pour le produit scalaire :
\[\int_{-1}^1 P_n(x) P_m(x) dx = \frac{2}{2 n + 1} \delta_{mn}\]
Ils obéissent à la récurrence :
\( P_0(x) = 1 \)
\( P_1(x) = x \)
\( (n+1) P_{n+1}(x) = (2 n + 1) x P_n(x) - n P_{n-1}(x) \)
4. Interpolation
Un problème d'interpolation consiste à trouver les coefficients : \(a_i\in\setR\) tels que la fonction :
\[u = \sum_{i=1}^n a_i u_i\]
où les \(u_i\) sont des polynômes de degré \(n\), vérifie :
\[\form{\phi_i}{u} = y_i\]
pour tout \(i=1,2,...,n\), où les \(\phi_i\) sont des formes linéaires de \(\mathcal{P}_N^D\) et les \(y_i\) des réels donnés.
On utilise couramment des bases biorthogonales :
\[\form{\phi_i}{u_j} = \delta_{ij}\]
et on a alors simplement :
\[a_i = \form{\phi_i}{u}\]
L'exemple le plus courant est :
\( \form{\phi_i}{u} = u(x_i) \)
\( y_i = f(x_i) \)
pour une certaine fonction \(f\) à interpoler. Les conditions ci-dessus se résument alors à l'égalité de \(f\) et de \(u\) en un nombre fini de points :
\[u(x_i) = f(x_i)\]
On rencontre parfois aussi le cas :
\( \form{\phi_i}{u} = \OD{u}{x}(x_i) \)
\( y_i = \OD{f}{x}(x_i) \)
4.1. Lagrange
Les polynômes de Lagrange \(\Lambda_i\) sont biorthogonaux aux formes :
\[\form{\phi_i}{u} = u(x_i)\]
On a donc :
\[\form{\phi_j}{\Lambda_i} = \Lambda_i(x_j) = \delta_{ij}\]
Le polynôme \(\Lambda_i\) doit donc s'annuler en tout les points \(x_j\), où \(j \ne i\). On peut donc le factoriser comme :
\[\Lambda_i(x) = A_i \prod_{j \in E_i} (x-x_j) = A_i P_i(x)\]
où \(E_i = \{ 1,2,...,n \} \setminus \{i\}\). Mais comme \(\Lambda_i(x_i) = 1\), on a :
\[A_i = \unsur{P_i(x_i)}\]
et :
\[\Lambda_i(x) = \prod_{j \in E_i} \frac{(x-x_j)}{(x_i - x_j)}\]
Donc si on souhaite construire un polynôme :
\[w(x) = \sum_{i=1}^{n} u_i \Lambda_i(x)\]
qui interpole \(u\) en les \(x_i\) :
\[u(x_i) = w(x_i)\]
pour tout \(i = 1,2,...,n\), il faut et il suffit de prendre :
\[u_i = \form{\phi_i}{u} = u(x_i)\]
4.2. Newton
L'interpolation de Newton utilise des polynômes construit récursivement à partir des polynômes de degré inférieur. Soit \(f\) la fonction à interpoler, \(p_{i,j}\) le polynôme de degré \(j-i\) :
\[p_{ij}(x) = \sum_{j=0}^{j-i} a_k x^k\]
tels que :
\[p_{ij}(x_k) = f(x_k)\]
pour tous \(k\in\{i,i+1,...,j\}\). On voit que si \(i=j\), on a :
\[p_{ii} = f(x_i)\]
Pour \(i < j\), on peut construire les \(p_{i,j}\) par récurrence. On vérifie que :
\[p_{ij}(x) = \frac{(x-x_i)p_{i+1,j}(x)-(x-x_j)p_{i,j-1}(x)}{x_j-x_i}\]
satisfait bien aux conditions d'interpolation ci-dessus.